[Un jour, une espèce] Le Canard colvert

Jeudi 7 mai, cinquante et unième jour de confinement (J -4). Mon petit garçon, Liam, 15 mois, fait très bien le canard, son papa aussi d’ailleurs, je leurs dédie cette chronique. « Le temps est venu de prendre soin et de réparer la planète ». Il nous reste quelques oiseaux !

Comme il faut bien s’occuper, je vais vous proposer de vous envoler aujourd’hui avec un oiseau qui cancane : le Canard colvert Anas platyrhynchos.

Attention : comme hier, une erreur malencontreuse s’est glissée dans le texte, saurez-vous la trouver ? (L’erreur d’hier : le Martinet noir est un excellent voilier, mais il est incapable de voler sur le dos.)

Comme le goupil nommé renard, le nom de canard vient d’un nom propre du Moyen-Age, dérivant lui-même de Caner (caqueter) et colvert vient de la couleur du mâle. En allemand c’est Stockente (ente=canard et stock=souche il niche sur les souches), en anglais mallard (du français mallard canard mâle), en espagnol dnade real (canard royal) et en italien germano reale (roi des allemands).

« Les canards dorment la tête tournée vers l’arrière, le bec glissé sous les grandes plumes scapulaires qui ornent le dos (et non pas la tête sous l’aile, comme le veut une expression dont il est difficile de s’affranchir). » Yves Thonnerieux (oiseaux.net)

Le Canard colvert fait partie de la famille des Anatinés. C’est le plus gros et le plus connu des canards de nos régions. Il est sédentaire et migrateur dans le Nord et l’Est de l’Europe. On le trouve partout où il y a des plans d’eau, même petits. C’est un canard de surface (il ne plonge pas sous l’eau), le mâle en plumage nuptial a la tête vert foncé irisé, un collier blanc, la poitrine brun foncé, le derrière noir avec deux boucles noires et le bout de la queue blanc, son bec est jaune et ses pattes oranges. La femelle a un plumage discret et cryptique. Jeunes, femelles et mâles disposent sur l’aile d’un miroir bleu-violet iridescent bordé de deux barres blanches.

Le Canard colvert peut être domestique, sauvage ou féral. Les croisements sont fréquents avec d’autres canards domestiques (barbarie) ou sauvages comme le pilet et les canards lâchés à fins cynégétiques issus d’hybridation, ce qui provoque des pollutions génétiques dans les populations sauvages. Le colvert est un oiseau grégaire, il n’est pas farouche, ne craint pas l’homme et s’acclimate parfaitement à une vie urbaine.

Le Canard colvert se nourrit sous l’eau en zone peu profonde, il plonge la tête sous l’eau et bascule vers l’avant pour atteindre le fond avec son bec. Il vient quelquefois à terre pour brouter l’herbe. Il est en grande partie granivore mais il mange également vers, insectes, têtards et même petits poissons… Les canards viennent souvent quémander aux hommes sur le bord des plans d’eau du pain, dont ils se gavent. Cette consommation massive de pain est la cause de la maladie des « ailes d’ange », leurs ailes pivotent et deviennent totalement inefficaces, ils ne peuvent plus voler. Le sel contenu dans le pain provoque également des problèmes cardiaques et rénaux.

Le Canard colvert sauvage est monogame, mais il change de partenaire chaque année. Ils sont souvent plusieurs mâles à courtiser une femelle, (les mâles sont plus nombreux que les femelles) certains cherchent même à s’accoupler alors qu’elles ne semblent pas consentantes. Le Canard colvert courtise la femelle sur l’eau durant tout l’hiver, tendant le cou, redressant la poitrine en gonflant les plumes et en donnant quelques coups d’ailes puis mettent le bec au raz de l’eau et partent comme des fous dans tous les sens. Les pontes ont lieu le plus souvent en mars/avril, mais peuvent s’étaler de février jusqu’en juin. Après l’acte, le mâle laissera la femelle se débrouiller seule pour la suite des événements. La femelle est assez fidèle au lieu de nidification, c’est elle seule qui bâtit le nid, caché au sol, avec des feuilles, de l’herbe, des joncs et du duvet qu’elle arrache de son plumage. La ponte est en général d’une dizaine d’œufs, l’incubation dure 28 jours. Les petits sont nidifuges, la cane emmène les canetons sur l’eau et reste avec eux jusqu’à l’envol qui s’effectue vers sept semaines. Quoique très discret, le nid est prédaté par le renard, la marte ou quelquefois la loutre.

Pendant que la femelle élève ses petits, le mâle effectue sa mue, il perd en même temps la presque la totalité de ses rémiges, ce qui l’empêche de voler, son plumage cryptique ressemble alors beaucoup à celui de la femelle.

Le Canard colvert est la sixième espèce la plus chassée en France, chaque année 1,5 millions de colverts sont tués (OFB). Comme tous les oiseaux d’eau, le canard est victime de l’intoxication au plomb, le saturnisme, par ingestion de plomb de chasse. Les cartouches au plomb sont interdites depuis 2005 sur les zones humides, mais on peut s’interroger sur l’application de cette loi et de toutes façons le temps de rémanence du plomb dans l’eau est extrêmement long. Plus 1 400 000  Canards colverts sont lâchés en France chaque année (OFB) pour augmenter les « prélèvements » cynégétiques, ce qui provoque un marronnage important et par croisement une menace sur l’intégrité génétique de l’espèce sauvage (problème identiques pour les sangliers, faisans, perdrix… la liste est longue).

https://www.oiseaux.net/oiseaux/canard.colvert.html

Sources : Guide ornitho, La mystérieuse histoire du nom des oiseaux de Henriette Walter, Les palmipèdes d’Europe de Paul Géroudet, Oiseaux.net.

Crédit photo : Didier Plouchard, Aurélie Delaval, Jessica Goudal.

A demain avec un oiseau de Géorgie.

Jean François

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