[Un jour, une espèce] L’Avocette élégante

Mercredi 15 avril, trentième jour de confinement. Comme on confine encore 25 jours, je vais élargir un peu la palette d’oiseaux à vous présenter, toujours des espèces locales mais quelquefois moins courantes. Il nous reste quelques oiseaux !

Comme il faut bien s’occuper, je vais vous proposer de vous envoler aujourd’hui avec un oiseau charmant : l’Avocette élégante Recurvirostra avosetta.

Attention : comme hier, une erreur malencontreuse s’est glissée dans le texte, saurez-vous la trouver ? (l’erreur d’hier : l’envergure du Faucon crécerelle est de 78 cm pour la femelle et pas 1,2 m).

Le nom de l’Avocette élégante vient du vieil italien avosetta, ce nom a donné en italien moderne avocetta, en espagnol avoceta et anglais avocet. Tout le monde est d’accord. Les allemands l’appellent Säbelschnädbler = à bec en forme de sabre. Le nom latin vient de recuvus = recourbé et rostrum = bec.

« L’avocette élégante a un long cou, son grand bec mince retroussé vers le haut est approprié à sa façon de se nourrir. » Didier Collin (oiseaux.net)

On trouve l’Avocette élégante en zone côtière, elle niche sur les bancs de sable, se nourrit dans les vasières saumâtres, peu profondes. On peut la voir chez nous dans le Calaisis, en baie de Canche et en baie de Somme… L’avocette fait partie de la famille des limicoles, appartenant à l’ordre des charadriiformes et à la famille des recuvirostridés (Ce classement vient d’une discipline appelée la taxinomie, ça paraît un peu rébarbatif, mais ça permet de ranger les oiseaux selon leurs caractéristiques). Elle a un plumage noir et blanc, de longues pattes gris-bleu et ce qui la rend évidente : un long bec noir et retroussé. Elle est sédentaire chez nous et migratrice plus au Nord.

L’avocette est le plus élégant des limicoles, le mâle et la femelle se ressemblent, mais si l’on y regarde de plus près la femelle a un bec un peu plus court et un peu moins retroussé vers le haut. En vol, du dessous, l’Avocette est toute blanche avec une calotte noire sur la tête et les rémiges noires (ce qui peut correspondre à la main). L’avocette émet régulièrement un petit « kluiit » agréable et clair.

Elle vit, souvent en groupes très visibles, dans les marais salants, les estuaires et les lagunes peu végétalisées. Elle se nourrit sur les zones dégagées dans des eaux salées ou saumâtres. Pour se nourrir, elle avance en balayant énergiquement la vase de droite à gauche avec son long bec retroussé. Elle capture des insectes aquatiques, des invertébrés, des larves, des petits crustacés, des vers et des petits poissons… Elle plonge parfois la tête sous l’eau comme les canards, elle est également capable de nager.

La parade nuptiale du couple d’avocette est remarquable de tendresse, le jour de la saint Valentin, le couple parade en synchronisant des mouvements de danse sur l’eau, le cou tendu, ils inclinent la tête de haut en bas en plongeant la tête dans l’eau. Puis ils se témoignent leur affection en se lissant les plumes. Ensuite, côte à côte, la femelle baisse la tête dans l’eau le mâle en passant derrière elle, va d’un côté à l’autre de madame. Ces parades préliminaires se répètent plusieurs fois longuement. Ensuite l’accouplement ne dure qu’un instant. L’acte terminé, ils se font des bisous en croisant leur bec, puis partent plus loin toujours côte à côte, le monsieur posant souvent une aile protectrice sur le dos de madame.

Le couple choisit alors l’emplacement du nid. Leur comportement change et devient agressif avec les autres oiseaux. La femelle chasse bruyamment les mouettes ou les canards qui s’approchent du territoire de nidification. Le nid n’est qu’un petit renfoncement gratté dans le sable, garni de brindilles, d’herbes ou d’algues sèches. Grégaire, l’avocette niche en petite colonie près de l’eau. Les pontes ont lieu fin avril début mai, 3 ou 4 œufs beiges tachés de brun sont pondus et les deux parents se relaient pour couver pendant un peu plus de trois semaines (les nids peuvent être prédatés par les goélands, les corneilles mais aussi les renards ou les sangliers). Dès l’éclosion, les petits quittent le nid (on dit qu’ils sont nidifuges), ils sont capables de se nourrir seuls, les parents les guident vers l’eau et assurent leur protection. Les petits peuvent être prédatés par les pygargues ou plus fréquemment par les hérons…

L’Avocette élégante est menacée par la destruction et la fragmentation des zones humides. La pollution des eaux est également problématique : insecticides arrivant par ruissellement, plomb dans les zones chassées (elle peut être victime du saturnisme aviaire provoqué par l’ingestion de grenaille de plomb), mercure et métaux lourds… Elle est également très sensible aux vagues de froid hivernal.

Au début du siècle dernier, l’avocette ne nichait qu’en Camargue, il y a une soixantaine d’année qu’on la voit chez nous. Cependant la population d’Avocette en France est relativement faible, on l’estime à 16 000 couples. Les lieux d’hivernage en Haut de France se comptent sur les doigts d’une main (un très bon lieu pour l’observer est la réserve du Marquenterre, en baie de Somme), ce qui fragilise énormément l’espèce. L’hivernage se fait sur des zones proches des estuaires et des activités industrielles, ces zones ne sont pas à l’abri non plus de pollutions marines.

https://www.oiseaux.net/oiseaux/avocette.elegante.html

Sources : Guide ornitho, La mystérieuse histoire du nom des oiseaux de Henriette Walter, Grands échassiers, gallinacés, râles d’Europe de Paul Géroudet, Oiseaux.net.

Crédit photo : Christophe Deswartvaeger, Serge Larivière, Didier Plouchard

A demain avec, selon l’humeur, la Chevêche d’Athéna ou le Choucas des tours.

Jean François

L’erreur : l’Avocette élégante ne fait pas seulement la cour le jour de la St Valentin

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