[Un jour, une espèce] Le Rougegorge familier

Mercredi 25 mars, neuvième jour de confinement. La page est quelquefois visitée plus de 2000 fois, cela nous honore et nous oblige, c’est aussi un peu stressant ! Il nous reste quelques oiseaux !

Comme il faut bien s’occuper, je vous propose aujourd’hui de vous envoler avec un oiseau très territorial : le Rougegorge familier Erithacus rubeculla. Il n’est pas facile de rédiger une fiche sur un oiseau que tout le monde connaît et pourtant je prends le pari de vous apprendre des choses…

Attention : comme hier une erreur malencontreuse s’est glissée dans le texte, saurez-vous la trouver ? (L’erreur d’hier : en chasse l’hirondelle atteint 100 km/h, 200 km/h c’est la vitesse du martinet. Quant au record il est évidemment tenu par le Faucon pèlerin qui fait des pointes de vitesse à 390 km/h !).

Le Rougegorge familier doit son nom à sa couleur, il a la gorge et la poitrine rouge/orangé. En allemand : Rotkehlchen Kehle = gorge, espagnol petirrojo : peto (au pluriel) = plastron, pareil en italien pettirosso petto = poitrine. En anglais c’est European robin, comme Robin Hood, le fameux Robin des bois qui volait aux riches pour donner aux pauvres. Robin vient en anglais de Robert. Un autre héros plus solitaire porte son nom aussi : Robinson Crusoe (Robinson Crusoé).

« … le jardinier qui laboure le voit souvent suivre son travail et picorer les vers et les larves que la bêche met au jour ; le bûcheron reçoit sa visite aux premiers coups de cognée, et il s’approche volontiers des chemins et des routes, si bien qu’il n’échappe pas toujours aux autos qui passent en trombe. » P. Géroudet

Le Rougegorge familier est un petit turdidé, comme le Gorgebleue à miroir son cousin. La famille des turdidés est une famille importante qui regroupe merles, grives, tariers, traquets… et le rouge-gorge. Plus ou moins gros les turdidés sont tous d’excellents chanteurs et l’un des plus doués pour le chant est bien sur le Rossignol philomèle.

Le Rougegorge familier habite les bocages et les milieux boisés. On le trouve aussi dans les jardins et les parcs, même en ville. Migrateur dans le nord-est de l’Europe. Très familier, surtout l’hiver, il n’est guère farouche, même s’il reste prudent. Il est principalement insectivore. Le Rougegorge est semi-cavernicole, il niche dans une souche d’arbre ou dans des rochers, sur les rives couvertes de lierre et même dans de grosses touffes d’herbes.

Il est en majeure partie insectivore : diptères, fourmis, perce-oreilles, chenilles, Coléoptères, lombrics… Il consomme également quelques fruits : aubépine, if, fraises, noix de coco, framboises, mures… L’hiver, quand la faim se fait sentir, il s’approche volontiers des maisons et des mangeoires, d’autant qu’à cette époque la population de Rougegorges augmente avec les migrants venus du Nord.

Son chant, très mélancolique, tout en douceur, lent et très mélodieux, ponctué de silences caractéristiques, pourrait, avec la douceur de son regard, nous faire penser à un petit « bisounours » ! tout gentil… Il trompe bien son monde ! Grand solitaire, le Rougegorge familier est insociable, il ne tolère aucun de ses congénères sur son territoire. Intolérant, il chasse l’Accenteur mouchet et le Pouillot véloce s’ils ont l’outrecuidance de s’introduire chez lui ! Furieux, il voit rouge et cette couleur l’énerve particulièrement, il poursuit le Rougequeue et s’il se voit dans un miroir, il va taper dedans quitte à s’assommer. On peut parfois voir 2 Rougegorges se toisant face à face à limite invisible mais nette de leurs territoires. Son chant en réalité a une signification toute belliqueuse. Il chante pratiquement toute l’année, et l’hiver c’est un des seuls que l’on entend. D’autant plus que la femelle, elle aussi, chante pour marquer son territoire.

Il n’y a pas de dimorphisme sexuel chez le rouge-gorge, et quand madame pénètre son territoire pour le choisir comme compagnon, elle subit le même sort… il l’accueille avec hostilité. Ils s’affrontent alors à coup de chants et de postures. Mais comme elle ne fuit pas et vole constamment à côté de lui en se comportant quelquefois comme un jeune oiseau qui mendie de la nourriture, son courroux fini par s’apaiser et la reproduction commence.

C’est la femelle qui construit le nid, souvent fin avril. Et c’est elle qui couve, 6 œufs en moyenne. Pendant ce temps, monsieur continue à défendre ses frontières. Les deux nourrissent les petits, même quand ils sont sortis du nid. Deux ou trois couvées se succèdent. Les jeunes sont nourris une douzaine de fois par jour au début, et jusqu’à soixante fois quand ils sortent du nid. Les nids sont parfois prédatés par des rongeurs, des belettes, des écureuils, des pies… Il arrive que le nid du Rougegorge familier soit parasité par le Coucou gris. (Comme chez d’autres passereaux, il arrive que le Rougegorge nourrisse les petits d’autres espèces comme le merle ou la grive. – il n’est donc pas totalement mauvais -)

Le Rougegorge familier est très répandu et peu menacé. Au sud de la méditerranée, il est lui aussi chassé au filet ou avec des pièges, c’est le cas particulièrement en Égypte où on le propose en met délicat pour les touristes. En France, pays de tradition et des droits de l’homme, mais certainement pas de l’oiseau, il se retrouve fréquemment piégé sur des bâtons de glu. Cette pratique barbare qui consiste à piéger merles et grives, qui sont chassables, avec un bâton enduit de glu fait de nombreuses autres victimes chez les oiseaux. Cette technique moyenâgeuse de chasse est encore pratiquée dans les Alpes-de-Haute-Provence, les Alpes-Maritimes, les Bouches-du-Rhône, dans le Var et le Vaucluse.

Vous pouvez aider le Rougegorge en disposant un nichoir pour semi-cavernicole dans un buisson dense ou sur un saule têtard. Vous pouvez également lui mettre à disposition l’hiver des vers de farine déshydratés ou du mélange rouge-gorge « I Love Robin » vendu bien évidemment sur l’excellent catalogue de la LPO.

https://cdnfiles1.biolovision.net/www.oiseauxdesjardins.fr/userfiles/Fichesespces/FicheespceRGF_1.pdf

Sources : Guide ornitho, La mystérieuse histoire du nom des oiseaux de Henriette Walter, les Passereaux d’Europe de Paul Géroudet, Oiseaux.net.

Crédit photo : Marcel Martel, Didier Plouchard, Serge Larivière, Aurélie Delaval

A demain avec un autre volatile, portez-vous bien.

Jean François

L’erreur d’hier : évidemment le Rougegorge familier ne mange pas de noix de coco 😉

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