Mercredi 22 avril, trente septième jour de confinement. Les grosses mouches au bourdonnement agaçant tournent déjà dans la maison. Il nous reste quelques oiseaux !
Comme il faut bien s’occuper, je vais vous proposer de vous envoler aujourd’hui avec un oiseau messager de fécondité : La Cigogne blanche Ciconia ciconia.
Attention : comme hier, une erreur malencontreuse s’est glissée dans le texte, saurez-vous la trouver ? (Le mâle de la Fauvette à tête noire n’a jamais de plumes rouges qui lui poussent sur la tête).
Le nom de la Cigogne blanche vient du latin ciconia. En allemand Weisser storch (weisser=plus blanc et storch qui vient de stark=raide) en anglais white stork, en espagnol cigüena, en italien cigogna.
« De nos jours encore, l’attitude des Hommes à l’égard de la nature et surtout du monde animal est profondément influencée par un héritage de croyances et de jugements dont l’origine se perd dans la nuit des temps. » Paul Géroudet
La Cigogne blanche fait partie de la famille des Ciconiiformes. Elle est migratrice et on peut la qualifier de prédateur opportuniste. Elle fréquente les marais et les terres inondables, les prés, les zones cultivées, les cours d’eau. C’est un grand oiseau au bec et aux pattes rouges, son plumage est blanc et noir. Elle vole le cou tendu avec la flèche rouge du bec et les pattes allongées en prolongation du corps, elle est blanche avec l’arrière des ailes noires.
La cigogne a bonne réputation, elle est le premier animal qui a été protégé par la loi. Dans l’antiquité, il était interdit de la détruire parce qu’elle rendait service à l’homme en attrapant des serpents, pour s’en nourrir. Un peu plus tard, un conte traditionnel Allemand : Adebar, en a fait un oiseau de bon augure puisqu’elle apporte la richesse et/ou la vie, le mythe de la cigogne transportant des bébés vient de ces légendes germaniques.
La Cigogne blanche marche, calmement, dans les prés ou dans l’eau peu profonde pour chasser. à l’envol, elle donne quelques coups d’aile et très vite elle se met à planer pour économiser l’énergie, profitant d’un ascendant thermique elle monte en orbe haut dans le ciel, de la même manière elle descend en décrivant des cercles successifs jusqu’au nid ou à terre. Elle est très grégaire, niche en groupe et il n’est pas rare de la voir en gros groupe dans les près pour se nourrir. Elle est peu farouche, on peut donc l’observer facilement, mais elle garde ses distances et s’éloigne si on l’approche trop. Elle n’est active qu’en journée.
La cigogne est muette, elle communique avec des craquètements. Elle replie le cou vers l’arrière, le bec touchant le dos et se met à utiliser ses mandibules comme des castagnettes en ramenant le cou vers l’avant puis le bas. Le son résonne dans son œsophage gonflé.
C’est en marchant doucement dans les lieux inondés, le long des fossés, des champs… que la cigogne chasse. Aucune espèce animale ne lui échappe : les insectes constituent une part importante de son alimentation, Coléoptères, mollusques, escargots, crustacés, campagnols, grenouilles, poissons, œufs, poussins… Qu’elle capture d’un geste vif et précis du bec. Les dépôts d’ordures attirent également les cigognes, cet hiver lors du comptage du Wetland nous avons vu un groupe d’une quarantaine de cigognes qui hivernaient, près d’Aire sur la Lys, non loin d’une décharge.
La Cigogne blanche construit d’énormes nids, sur les cheminées, les arbres, les plates-formes que l’on met à leur disposition, les toits d’églises, les pylônes électriques… Il est toujours implanté sur un endroit élevé. Quelquefois en colonie avec des hérons, des spatules ou d’autres échassiers. Elle revient au nid chaque année, le mâle, arrivant le premier, se pose et craquette immédiatement pour affirmer la possession du lieu. Il y a quelquefois bagarres, dans les gros groupes, pour la possession des nids. Nous avons dans le Pas-de-Calais une dizaine de couples nicheurs. L’accouplement se fait sur le nid. Le nid est rechargé chaque année par le couple de matériaux divers et variés : chiffons, pneus de vélo, plastiques s’entremêlent avec les branches, les ramilles et les herbes. Au fil des années, il devient énorme, quelquefois plus d’un mètre de haut. Des oiseaux y nichent parfois : moineaux, étourneaux, Bergeronnettes grises, harles…
La ponte de 3 à 5 œufs (1 œuf tous les 2 ou 3 jours) blancs se fait en général en avril/mai. Le couple se relaie régulièrement pendant la journée pour couver, la femelle couve toute la nuit. Après une trentaine de jour d’incubation, les petits naissent. Pendant plus de 3 semaines, les parents en alternance sont constamment au nid. Le couple va les nourrir pendant environ trois mois en régurgitant la nourriture dans le nid et en leur apportant de l’eau dans le bec quand il fait chaud. A deux mois, les cigogneaux prennent leur premier envol, il se fait sans apprentissage avec des atterrissages quelquefois acrobatiques. La jeune cigogne rejoint encore pendant près d’un mois le nid pour la nuit ou pour être nourrie.
La Cigogne blanche migre dès fin août en prenant les ascendants thermiques, elle part traditionnellement vers l’Afrique. Cependant, avec le réchauffement climatique, cette migration se limite souvent à l’Espagne et de nombreuses cigognes de l’est viennent passer l’hiver chez nous. Ces migrations plus courtes favorisent probablement l’expansion de l’espèce. En 1970 il restait une dizaine de couples dans l’est de la France et l’espèce était vouée à la disparition. Puis elle a commencé à reconquérir les territoires perdus (la Cigogne blanche était courante dans toute la France, sauf en Bretagne, avant la révolution française). C’est maintenant la région Aquitaine qui compte le plus de cigognes (beaucoup sont originaires d’Espagne). Les scientifiques de la LPO ont mis en évidence une corrélation entre l’expansion des écrevisses américaines (espèces invasives) et celle de la cigogne qui les consomme très volontiers.
La LPO Pas-de-Calais suit de près les populations de cigognes qui viennent nicher chez nous. Sans pour autant favoriser leur implantation (nous ne posons des plates-formes qu’en cas de nécessité absolue et de dérangement important). L’installation de la cigogne dans de nouvelles zones risque de déséquilibrer l’écosystème local en détruisant les amphibiens ou les reptiles comme la couleuvre, classés bien souvent sur la liste rouge des espèces en danger.
https://www.oiseaux.net/oiseaux/cigogne.blanche.html
Sources : Guide ornitho, La mystérieuse histoire du nom des oiseaux de Henriette Walter, Grands échassiers, Gallinacés, Râles d’Europe de Paul Géroudet, Oiseaux.net.
Crédit photo : Christophe Deswartvaeger, Didier Plouchard. Louison Bocquelet, Marcel Martel, Serge Larivière.
A demain avec un nouveau turdidé.
Jean François
L’erreur : le harle, ce beau canard, fait son nid dans les trous des arbres mais pas dans les nids de cigognes